clientélisme
Discours à Populus.
A Rome, au temps de César on achetait les votes, la République, le peuple étaient à vendre, et César a tout acheté grâce au richissime Crassus et au produit de ses conquêtes gauloises. Aujourd’hui les choses ont-elles vraiment changées ? En apparence oui, le nombre d’électeurs impliqués est beaucoup plus grand, les systèmes d’échange sont plus sophistiqués…Mais à y regarder de plus près, que de similitudes.
Comment achète-t-on maintenant les votes ? Par des promesses, qui se traduiront plus ou moins par des lois récompensant sa clientèle et ses gens, comme à Rome. La clientèle politique est segmentée chaque parti politique chaque mouvement exploite une niche dans le grand marché des scrutins, qu’il récompense en fonction des pouvoirs que toi Populus tu lui as confié. On appelle cela répartir les fruits de la croissance et lutter contre les injustices sociales. De ruineuses politiques sans lendemain sont ainsi entreprises, la croissance stagne, l’injustice règne, la désillusion gagne. Les promesses des autres qui ne coûtent qu’à ceux qui les écoutent, finissent par attirer le chaland, l’opposition devient majorité, la politique change, la ruine succède à la ruine, la fiscalité étouffe, Populus s’agite, les rues ne sont plus sures, les bandes font la loi, la lumière des grandes cités attire la misère qui pullule, Populus tu t’effrayes et tu cherches un sauveur. Mais César n’est plus ! Ta destinée t’appartient.
Ne distribue plus de manière inconsidérée aux flatteurs l’ensemble du pouvoir. Garde-en un peu pour toi. Que ta sagesse et ta conscience s’éveille et s’exprime à travers une assemblée qui te ressemble. Voilà ce que je te propose ! Voilà pourquoi je demande ton soutien.
De grâce ne te laisse plus acheter par des promesses sans lendemain, confie à d’autres toi-même le soin de juger du principe de la simplicité et de l’équité des lois. Comprend bien que l’Etat n’est rien sans toi, toi seul crée la richesse, les puissants de ce monde te sont redevables des richesses et des honneurs que tu leur confies, ils ne sont pas là pour agir en maîtres, ils sont tes serviteurs. Ne te laisse plus abuser par les subsides que l’on t’octroie, ce n’est que ton argent que l’on te rend, tu n’as pas besoin d’aumône, tu es naturellement désireux d’agir et d’être utile. Tu cherches dès le plus jeune âge à comprendre et à faire. Ces cubes que, bébé, l’on a empilé et démoli inlassablement des centaines de fois, voilà notre nature profonde, notre inné.
L’assemblée des similaires ou la chambre des 1000 que je soumets à ton vote c’est ta voix au niveau de l’Etat que je veux faire entendre. N’écoute pas ceux qui t’en prétendent incapable. Ton vote te sera dicté par ta conscience. Il y en aura toujours quelques uns parmi vous qui connaîtra suffisamment le sujet pour pouvoir expliquer, certains seront pour, d’autres contre, ils diront pourquoi. Toi tu écouteras, tu discuteras, tu liras, tu t’instruiras de la chose, tu amenderas… A la fin quand ta conscience te le dicteras tu approuveras la loi au 2/3, alors elle sera la loi pour tous, elle sera légère et simple, appréciée du plus grand nombre. Ces 1000 du peuple ne sont après tout que l’équilibre des presque 1000 du Sénat et de l’Assemblée qui ont été accordé par le peuple aux partis. La Politique et la Conscience réunies, voilà le nouveau visage des pouvoirs de l’avenir.
Que ceux et celles que le sort aura désigné restent anonymes, qu’ils délibèrent à huis clos, dans le calme et le réflexion. Nécessité, équité et simplicité voilà les valeurs auxquelles la loi devra répondre.
A ceux qui douteraient de l’existence de la conscience, qu’ils se renseignent on sait que notre espèce pratique une vie sociale tintée d’altruismes autour d’une organisation familiale et affective depuis des millions d’années. A Laetoli en Tanzanie, les empreintes laissées par les pas de nos aïeux australopithèques en témoignent. La métamorphose vers l’homme pensant et conscient d’aujourd’hui est connue dans ces grandes lignes si ce n’est par son détail. La révolution politique industrielle et sociale de ces deux derniers siècles a produit un peuple de plus en plus éclairé qui a développé des systèmes de collaborations complexes et sophistiqués. Que ce peuple ne puisse juger les lois qui vont lui être appliquées est un aberration, presque une injure. Le peuple ne serait-il souverain et éclairé qu’au moment où par son vote il confie sa destinée aux représentants des partis, ensuite il redeviendrait imbécile et incapable.
Non, que ceux qui croient en leurs proches en leurs collaborateurs, en leur mécanicien, leur boulanger, qui croient en l’homme et plus généralement en l’humanité, que tous ceux-là nous rejoignent au moins sur ce point et défendent l’institution de la chambre des 1000, comme juge ultime des lois et des décrets d’application des lois. C’est la meilleure garantie pour une loi respectable et respectée.
Mais Populus, tu sens comme moi que ce n’est pas là que ta conscience sera la plus utile. Pourquoi es-tu si essentiel pour les temps qui viennent ? Certes tu réussiras certainement en quelques décennies à rendre notre société plus riche. Mais cette richesse construite sur une montagne de pauvreté elle te semble fragile. Les dommages pour certains déjà irréversibles que notre activité fait peser sur les grands équilibre de la planète te préoccupent plus que tu ne le laisses paraître. Là, tu sens ta descendance menacée. Confusément, au loin c’est l’humanité même qui est en danger. Peut-être est-ce son destin que de disparaître à l’aube, au sortir d’un grand sommeil peuplé de rêves hantés d’horribles cauchemars. Une humanité, chair de l’univers qui exhalerait son dernier souffle alors que ses paupières s’entrouvrent. Les yeux baignés d’une clarté embuée, elle s’éteint au petit jour, son âme s’évapore à jamais dans le froid sidéral, elle quitte ce corps chaud plein de sang et d’humeur, en partant elle verse une dernière larme. Quel gâchis, quelle occasion manquée pense-t-elle alors qu’un frisson l’envahit.
Moi je n’y crois pas et vous non plus vous n’y croyez pas, je le sais, je le sens au fond de vous. Où est l’inéluctable ? Ne sommes-nous pas en la matière les décideurs ? Qui monte les usines, fabrique les produits, jette les emballages, gaspille l’énergie, déclenche la guerre et le massacre, entretient la terreur, manipule et corrompt. Qui dites le moi ? Dieu des dieux des démons, envoûtement, cynisme, avidité, cupidité, folie ? Non aucun de ces mots, ils ne sont qu’alibis inventés pour apaiser les tourments de notre âme face à nos propres crimes. Nous ne sommes pas des Saints, c’est pourquoi c’est par la règle que nous progressons. Rituels, sacrements, lois, coutumes, traités, commémoration… La règle, son rappel inlassable, les sanctions pour qui l’enfreint. A chaque âge ses règles, les règles de l’enfant, les responsabilités de l’adulte. Partout, une règle s’applique même à la guerre où les crimes sont punis, on est prié de massacrer proprement.
Ce que je veux c’est que toi Populus partout dans le monde, tu disposes d’une chambre de personnes qui te ressemblent que le sort aura désigné parmi celles et ceux qui le désirent. Ces citoyens ordinaires panels de nos populations seront quelques années de leur vie ta conscience puis ils disparaîtront en toi et d’autres les remplaceront afin qu’à jamais ta conscience s’incarne dans les Etats.
Alors, ton destin humanité est immense, des millions d’années que tu te bats avec la matière, pour exister d’abord puis te mouvoir, penser, parler, comprendre , lire, écrire, compter, fabriquer, alors que tes pouvoirs croissent exponentiellement et qu’enfin tu espères avoir les outils pour vaincre la misère, tu dois pouvoir exprimer ton choix, tes choix pour le monde de demain.
Si le sort te désigne un jour, toi qui m’écoutes, rappelle toi les exigences d’une telle charge. La durée de ton mandat, tu n’en tireras ni gloire, ni publicité, ni profit, tu seras muet. Tous les jours tu liras, discutera, expliquera, tu écouteras aussi pour qu’on t’explique. Petit à petit, amendements, mise en garde, discussion, réflexions, conseil… Ne néglige rien car tu nous dois des lois équitables et applicables.
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